Statut du Procureur de la République : Dossiers SOS JUSTICE

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17/04/2011

Justice : Le procureur général près la Cour de cassation juge inéluctable l'évolution du statut du parquet français. EEENNOORRME !

Le procureur général près la Cour de cassation juge inéluctable l'évolution du statut du parquet français.

 (c) Afp
(c) Afp

Le procureur général près la Cour de cassation, Jean-Louis Nadal, s'est à nouveau prononcé pour une évolution du statut du parquet français, la jugeant "inéluctable", vendredi 15 avril à l'occasion de la présentation du rapport annuel de la haute juridiction.

Lors d'une conférence de presse, Jean-Louis Nadal a cité, parmi les décisions importantes de la Cour de cassation l'an passé, celle du 15 décembre 2010. La haute juridiction judiciaire avait alors jugé que le parquet français n'était pas une autorité judiciaire indépendante selon le droit européen, tout en estimant qu'il pouvait contrôler la garde à vue.

"Toutes les conséquences" n'ont pas été tirées de cette décision, a souligné Jean-Louis Nadal.

Interrogé sur le sens de ses propos, il a estimé que la justice souffrait aujourd'hui d'"une carence fondamentale dans sa politique de communication".

"Parmi les phases d'incompréhension, il y a celles qui concernent le parquet", a-t-il ajouté. "Il y a, qu'on le veuille ou pas, une suspicion qui pèse lourdement sur le système français".

"Les choses sont claires pour moi: le parquet français doit être revisité", a-t-il dit: "il faudra sortir de cette impasse, c'est inéluctable".

Le même mode de nomination que les magistrats du siège siège

En janvier, lors de la rentrée solennelle de la Cour de cassation, Jean-Louis Nadal avait préconisé de "couper tout lien entre l'échelon politique et le parquet pour ce qui concerne les nominations".

Il s'était dit favorable à un alignement du mode de nomination des magistrats du parquet sur ceux du siège. Ces derniers sont nommés sur avis contraignant du Conseil supérieur de la magistrature (CSM), alors que pour les procureurs, le CSM donne un avis simple, que la Chancellerie n'est pas tenue de suivre.

L'année 2010 a été marquée par l'entrée en vigueur de la réforme permettant aux justiciables de saisir le Conseil constitutionnel, a souligné le premier président de la Cour de cassation, Vincent Lamanda.

539 Questions prioritaires de constitutionnalité

La Cour de cassation, qui joue un rôle de filtre, a été saisie de 539 Questions Prioritaires de Constitutionnalité (307 au pénal et 232 au civil) et en a renvoyé 122 au Conseil constitutionnel (99 au pénal et 23 au civil), a-t-il précisé.

Parmi les QPC transmises aux "Sages" figuraient notamment certaines portant sur la motivation des arrêts d'assises, ainsi que sur le mariage et l'adoption homosexuelles.

Le "surcroît de travail" occasionné pour la Cour de cassation par l'examen des QPC n'a pas entraîné une hausse des délais de jugement pour les autres affaires, a souligné M. Lamanda.

Les dossiers civils sont désormais traités en moyenne en "à peine plus d'une année" tandis que le traitement des dossiers en matière pénale prend "un peu moins de cinq mois".

La Cour de cassation a jugé au total 28.000 affaires en 2010.

Nouvelobs.com - AFP

http://tempsreel.nouvelobs.com/actualite/societe/20110415...

 


Gardes à vue contraires aux libertés fondamentales : le ciel ne peut pas attendre par le Syndicat de la Magistrature

Un communiqué de presse qui donnait déjà en août 2010, les consignes pour les magistrats.

Ces consignes étaient à l'avant-garde de la loi qui a été votée le 14 avril 2011.

C'est ce que l'on appelle : travailler par anticipation.

Bravo le Syndicat de la Magistrature !

Bravo aussi aux deux avocats de Sos Justice & Droits de l'Homme, Maître Philippe FORTABAT-LABATUT et Maître Djilali RABHI qui ont conjointement rédigé la lettre adressée à la Gendarmerie de Le Bar Sur Loup le 24 mars 2011 lors de ma garde à vue  et qui ont travaillé pour prévenir les dysfonctionnements judiciaires dans le dossier.

La gendarmerie ne pourra pas dire qu'elle n'était pas prévenue !

Lisez le courrier rédigé par les deux avocats et adressé le 24 mars 2011 à 9 h à la Gendarmerie de Le Bar sur Loup :

Fax Gend bar sur Loup du 24 mars 2011 à 9 h.pdf


Gardes à vue contraires aux libertés fondamentales : le ciel ne peut pas attendre

Communiqués de presse, publié le 3 août 2010, mis à jour le 3 août 2010

La décision rendue le 30 juillet par le Conseil constitutionnel à propos de la garde à vue est assurément importante.

Par sa motivation d’abord, qui sonne comme un démenti cinglant adressé à la politique pénale que le Syndicat de la magistrature dénonce depuis de nombreuses années. En effet, le Conseil affirme clairement (c. 15 à 18) que le dévoiement du recours à la garde à vue et le recul du judiciaire au profit du policier sont le résultat de choix politiques qui ont déséquilibré notre procédure pénale : contournement des juges d’instruction, généralisation du traitement en temps réel, culture de l’aveu, banalisation de l’attribution de la qualité d’officier de police judiciaire.

Le Conseil fait même référence – pour la première fois en ce qui concerne la garde à vue – au principe constitutionnel de la sauvegarde de la dignité de la personne. Il rappelle à cet égard « qu’il appartient aux autorités judiciaires et aux autorités de police judiciaire compétentes de veiller à ce que la garde à vue soit, en toutes circonstances, mise en oeuvre dans le respect de la dignité de la personne » et qu’ils doivent en tirer les conséquences dans le cas contraire (c. 20). De fait, comme l’a encore récemment souligné le Contrôleur général des lieux de privation de liberté, les locaux de garde à vue sont ceux où « est la plus malmenée l’intimité des personnes qui y passent »...

Enfin, le Conseil stigmatise, outre l’absence de critère lié à la gravité des infractions en cause et le défaut de notification au gardé à vue de son droit de garder le silence (notification supprimée par la loi dite « Perben 1 » du 4 mars 2002), l’impossibilité générale de bénéficier de « l’assistance effective d’un avocat » (c. 27 à 29). Autrement dit, et contrairement à ce que la Chancellerie n’a cessé d’affirmer ces derniers mois, s’entretenir avec un avocat pendant une demi-heure sans qu’il puisse avoir accès au dossier ni assister aux auditions, ce n’est pas être réellement « assisté ».

Cette décision est ensuite importante par sa portée juridique : l’anéantissement des textes concernés. Michèle Alliot-Marie ne peut donc plus s’abriter derrière la pseudo-unité de son inacceptable avant-projet de réforme de la procédure pénale pour ne rien faire : l’urgence, c’est la transformation radicale de la garde à vue. Que le gouvernement et ses soutiens policiers le veuillent ou non.

Pour autant, cette décision pose trois problèmes majeurs, qui sont manifestement le fruit d’un compromis politique.

D’abord, en différant la prise d’effet de sa décision, le Conseil place les justiciables dans une position aberrante. Selon son considérant 30, il ne sera pas possible de contester la constitutionnalité des gardes à vue prises avant le 1er juillet 2011, ce qui signifie que les personnes qui ont indirectement saisi le Conseil ne bénéficieront pas de sa décision et que la Constitution peut continuer à être impunément violée pendant onze mois au détriment de centaines de milliers d’autres ! C’est d’ailleurs ce que la Chancellerie a indiqué sans complexe à tous les chefs de juridictions dans une dépêche datée du 30 juillet...

Ensuite, en refusant de réexaminer la constitutionnalité des gardes à vue dérogatoires (criminalité organisée, terrorisme), le Conseil laisse paradoxalement subsister des textes dont l’usage s’est également banalisé, qui sont encore plus attentatoires aux libertés constitutionnellement garanties et qui seront immanquablement sanctionnés par la Cour de Strasbourg.

Enfin, le Conseil a choisi – malgré le récent arrêt européen Medvedyev – de réaffirmer l’appartenance des magistrats du parquet à l’autorité judiciaire et leur compétence pour contrôler les gardes à vue (c. 26), confortant ainsi opportunément le pouvoir exécutif dans son refus d’assurer l’indépendance du ministère public.

Ces trois fleurs offertes au gouvernement rappellent avec force la nécessité de garantir une composition véritablement non partisane de cette instance et les limites, en l’état, de la question prioritaire de constitutionnalité.

Le Syndicat de la magistrature considère que la sauvegarde des libertés ne saurait souffrir de tels atermoiements tactiques. C’est pourquoi il invite l’ensemble des magistrats à continuer d’appliquer la Convention européenne des droits de l’Homme pour censurer sans attendre les gardes à vue qui violent les libertés fondamentales.

Ci-joint : la dépêche de la Chancellerie en date du 30 juillet qui invite les magistrats à ne tenir aucun compte de la décision du Conseil constitutionnel avant le 1er juillet 2011...

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07/04/2011

Garde à vue, débat à l'Assemblée nationale des 5 et 6 avril 2011

Les 5 et 6 avril 2011, l'Assemblée Nationale débattait sur la réforme et la légalité de la garde vue, en deuxième lecture du texte.

En direct le 6 avril 2011 à 16h 15 débat télévisé sur la garde à vue sur le site de l'assemblée Nationale.

Chaîne de l'assemblée nationale.

Pour voir les vidéos, il faut cliquer sur l'onglet "à la demande". 

http://www.assemblee-nationale.tv/chaines.html

L’examen en 2ème lecture de la réforme sur la garde à vue s'est terminé, avec vote définitif mardi prochain 13 avril 2011 avec tous les députés.

Le compte rendu intégral du débat à l'Assemblée Nationale du 5 avril 2011
Assemblée nationale XIIIe législature

Session ordinaire de 2010-2011
Compte rendu intégral
Deuxième lecture du mardi 5 avril 2011

Le compte rendu à voir ici ou en pièce jointe : ICI
http://www.assemblee-nationale.fr/13/cri/2010-2011/201101...

Quelques extraits du compte rendu intégral :

Enfin, je l’ai déjà souligné, le contrôle de la garde à vue est confié au procureur, juge par statut, et non à un véritable magistrat rendant des décisions juridictionnelles. De nombreuses voix s’élèvent pour demander que la garde à vue soit placée sous la responsabilité d’un magistrat indépendant. À cette fin, le choix devrait être fait de donner cette responsabilité au juge des libertés et de la détention, qui serait doté du pouvoir, sur saisine de la personne gardée à vue ou de son avocat, de mettre fin à tout moment à la mesure après un débat contradictoire.

Vos débats ont aussi permis de préciser les motifs pouvant fonder des dérogations au droit à l’assistance d’un défenseur, celles-ci étant justifiées, selon les termes mêmes de la Cour de cassation, par des « raisons impérieuses tenant aux circonstances particulières de l’enquête ». La décision du procureur de la République sera lourde de sens puisque, en vertu de l’article 1er A que vous avez adopté, les déclarations recueillies hors la présence d’un avocat ne pourront fonder, seules, une condamnation.

M. Dominique Raimbourg.et qui nous impose, en effet, de considérer que le procureur ne sera pas tout à fait un magistrat tant que son statut n’aura pas été aménagé et amélioré.

La Cour européenne des droits de l’homme nous dit également que le procureur, non content de ne pas être un magistrat, est en plus une partie au procès. Cela heurte notre façon continentale de voir les choses,…

M. Sébastien Huyghe. Entièrement d’accord !

M. Dominique Raimbourg. …mais c’est ainsi ; c’est la Cour européenne qui fait la jurisprudence, ce n’est pas nous avec notre manière continentale de voir les choses, quand bien même nous devons la défendre. C’est ainsi que les choses se présentent.

Or nous ne sommes pas à l’abri de critiques, parce que c’est au procureur de la République qu’il revient de trancher sur un certain nombre de points. C’est lui qui est chargé de contrôler la garde à vue et de prendre la décision d’écarter l’avocat des auditions et de lui refuser l’accès au dossier pendant douze heures. Cela sera forcément interprété par la Cour européenne des droits de l’homme comme une atteinte au droit des parties. Cette atteinte au droit de l’une des parties, qui est de plus le fait d’une autre partie, sera considérée comme non conforme à la Convention européenne des droits de l’homme. Il y a donc là une difficulté importante.

Dominique Raimbourg - Garde à vue du 5 et 6 avril 2011

Sur le statut du procureur de la République qui n'est pas une autorité judiciaire indépendante du pouvoir exécutif (le pouvoir politique), et sur la réforme du CSM qui n'est pas non plus une autorité indépendante du pouvoir exécutif (le pouvoir politique), ce qui remet en cause le mythe de la séparation des pouvoirs de l'état et de la Justice. La séparation des pouvoirs de l'état, encore un mythe que l'on veut faire avaler aux citoyens français.

http://www.dailymotion.com/video/xi0b68_dominique-raimbourg-garde-a-vue-du-5-et-6-avril-2011_news


Dominique Raimbourg - Garde à vue du 5 et 6... par sos-justice



Et on nous parle de la République =
l'arrêt public et du Gouvernement = le gouverne-ment.

L'intervention de Julien Dray sur la Garde à vue, le 5 avril 2011

http://www.dailymotion.com/video/xhzkvh_julien-dray-sur-l...


Julien Dray - Sur la garde à vue -05/04/2011par sos-justice


Sur l'Organisation & Fonctionnement du Conseil Supérieur de la Magistature ou CSM

Les décisions et avis du CSM

  • Chacune des deux formations se réunit périodiquement sous la présidence du Président de la République ou du garde des Sceaux, qui le supplée et assure la vice-présidence du CSM. L’article 65 de la Constitution prévoit que le Conseil comprend deux formations, respectivement compétentes pour les nominations des magistrats du siège et du parquet.
 

 

Arrêt Medvedyev de la CEDH: réaction du Club Droits, Justice et Sécurités

Encore sur le statut du Procureur de la République et sur la légalité des gardes à vue ou les privations des libertés individuelles.

 

La Grand Chambre de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) vient de rendre son arrêt dans l’affaire Medvedyev après neuf mois et demi de délibéré. Elle confirme l’arrêt de section du 10 juillet 2008 qui avait condamné la France pour violation de l’article 5 §1 de la Convention européenne des droits de l’homme, à savoir la privation de liberté sans base légale d’un équipage arrêté en haute mer.

Rappelons rapidement les faits. Le Winner, qui bat pavillon cambodgien, est intercepté dans les eaux internationales au large du Cap-Vert, le 13 juin 2002, par un navire de guerre et les forces spéciales françaises. Dans les colis jetés à la mer par l’équipage, on trouve 100 kgs de cocaïne. Les onze membres d’équipage sont gardés sous arme, et ramenés à Brest où ils arrivent le 26 juin 2002, le tout dans le cadre d’une opération dont le volet judiciaire s’est déroulé sous l’autorité du procureur de la République.


La CEDH, en rappelant la nécessité de lutter contre le trafic de stupéfiants, a regretté que la communauté internationale n’ait pas mis en place un cadre juridique adapté de coopération et a souligné que la privation de liberté, pour éviter tout risque d’arbitraire, devait respecter le principe de la légalité internationale.


Un autre enjeu de cette décision concernait le statut du ministère public français, à propos duquel la première décision de juillet 2008, avait incidemment souligné : « Force est de constater que le procureur de la République français n’est pas une autorité judiciaire, au sens que la jurisprudence de la Cour donne à cette notion. Il lui manque en particulier l’indépendance à l’égard du pouvoir exécutif pour pouvoir être ainsi qualifié ».


Cette affirmation, si elle était reprise dans ces termes par la Grande Chambre, fragilisait encore plus le projet de réforme de la procédure pénale supprimant le juge d’instruction pour confier au parquet toutes les enquêtes, dont les affaires les plus sensibles jusque-là conduites par ce juge indépendant. C’est pourquoi le gouvernement français a fait monter la pression autour de la Cour en rappelant que, si elle vérifiait au cas par cas la conformité des procédures aux règles de la Convention, elle ne pouvait pas porter un jugement général sur la ministère public français.


La CEDH a donc subtilement « botté en touche » sur la question du statut du procureur français, en faisant comme si la question ne se posait pas parce que les marins du Winner ont été présentés à un juge d’instruction après qu’une information judiciaire eut été ouverte deux jours avant leur arrivée à Brest. Et la Cour n’a pas voulu considérer que les privations de liberté par les forces spéciales françaises les onze jours qui précédaient avaient été conduites sous le contrôle du parquet. Mais cette question a fait débat puisque c’est à la majorité la plus courte, de neuf juges contre huit que la CEDH a refusé de condamner la France sur ce point. Et les juges minoritaires ont émis une opinion dissidente très argumentée sur l’examen qu’aurait du faire la Cour de cette question.


La Cour s’est donc contentée de rappeler sa jurisprudence constante depuis 1979 selon laquelle, pour statuer sur la liberté : « Le magistrat doit présenter les garanties requises d'indépendance à l'égard de l'exécutif et des parties, ce qui exclut notamment qu'il puisse agir par la suite contre le requérant dans la procédure pénale, à l'instar du ministère public ».


Le projet de réforme de la procédure pénale qui renforce considérablement les pouvoirs du parquet, met la justice pénale entièrement sous contrôle du pouvoir exécutif. Seule une réforme du statut du ministère public renforçant les garanties d’indépendance peut assurer l’impartialité des enquêtes et la protection des libertés individuelles..


http://blogs.mediapart.fr/edition/droits-justice-securite...

La CEDH (Cour Européenne des droits de l'homme) et le statut du Parquet Français

Toujours sur le statut du Procureur de la République et sur la légalité des gardes à vue.

L’arrêt Medvedyev du 18 juillet 2008 ; ou comment les marins du cargo Cambogien Winner risquent de couler le parquet Français.

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On aurait pu en rêver et ils l’ont fait !  Enfin………. presque.

Ce ne sont pas les marins ukrainiens, roumains, grecs et chiliens du cargo Cambodgien Winner, mais les juges de la cour Européenne des droits de l’homme qui ont lancé un pavé dans la marre du système judiciaire Français.

Dans sa décision déjà célèbre du 18 juillet 2008 (Affaire Medvedyev contre France) la cour Européenne a considéré que ;

«  ... le procureur de la république n’est pas une autorité judiciaire au sens que la jurisprudence de la cour donne à cette notion : comme le souligne les requérants, il lui manque en particulier l’indépendance à l’égard du pouvoir exécutif pour pouvoir être ainsi qualifié ».

Cette conception de l’autorité judiciaire affirmée par la Cour Européenne des droits de l'homme (CEDH) s’oppose diamétralement à la conception française historique. Elle pourrait avoir de sérieuses conséquences sur le système judiciaire Français actuel, ainsi que sur les projets de réforme de la procédure pénale,  notamment celle annoncée du juge d’instruction.

Rappel des faits ; Dans le cadre d’une coopération intergouvernementale contre le trafic de stupéfiants, le Winner battant pavillon cambodgien est intercepté et contrôlé au large du cap vert par la marine française qui trouve une importante quantité de cocaïne à son bord.  Après consignation des marins dans les cabines du winner le navire est amené au port de Brest au cours d’un voyage de 13 jours et à l’arrivée duquel les marins sont placés en garde à vue.

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Une partie de ces marins avaient introduit une requête devant la Cour pour violation de l’article 5 de la convention Européenne des droits de l’homme portant sur le droit à la liberté et à la sureté en ses paragraphes 1;

 « interdiction des privations de libertés hors des cas prévus par ce paragraphe et selon les voies légales »

et paragraphe 3;

 « toute personne arrêtée ou détenue […] doit être aussitôt traduite devant un juge ou un autre magistrat habilité par la loi à exercer des fonctions judiciaires ».

C’est précisément en examinant la conformité de la procédure mise en œuvre par la France avec les dispositions de ce paragraphe 3 de la convention, quant à la nécessité de placer les conditions de la privation de liberté sous le contrôle de l’autorité judiciaire, que la CEDH à jugé que le procureur de la république française n’était pas une autorité judiciaire en raison de sa dépendance à l’égard du pouvoir exécutif.

 A la suite de diverses affaires politico judiciaires intervenues ces vingt dernières années, la pression médiatique était apparue de plus en plus forte pour remettre en cause le lien hiérarchique entre les magistrats du parquet et le pouvoir politique.

A travers ce débat la question qui se pose est celle du statut du magistrat exerçant l’autorité judiciaire et plus particulièrement ;

L’exercice de l’autorité judiciaire est elle compatible avec une subordination à l’égard du pouvoir politique ?

La réponse française est positive, et n’a jamais été remise en cause par les pouvoirs politiques et judiciaires français, mais elle est aujourd’hui sévèrement bousculée par la jurisprudence de la CEDH.

En France, l’autorité judiciaire comprend à la fois le magistrat du siège et ceux du parquet, malgré la dépendance de ses derniers à l’égard du pouvoir exécutif, et même si certains parquetiers eux-mêmes ont parfois dénoncé la contradiction qui peut exister entre une vision centralisée à partir des ministères et la réalité de terrain.

La question fait débat et génère des projets de réforme du statut des magistrats du parquet qui proposent de leur garantir une plus grande liberté d’action, mais sans toutefois remettre en cause ce fameux lien hiérarchique historique avec le pouvoir politique.

La loi du 9 mars 2004 est d'ailleurs venue consacrer ce modèle jacobin centralisé et hiérarchisé du ministère public au sommet duquel se trouve le garde des sceaux, et dont le principe avait déjà été expressément admis par le pouvoir judiciaire.

Ainsi, dans une décision du 10 mars 1992 la chambre criminelle de la cour de cassation avait aussi tranché par l’affirmative la question de la qualité de juge du représentant du ministère public Français, au sens de l’article 5.3 de la CEDH, en affirmant que le procureur de la république était bien un magistrat de l’ordre judiciaire au motif « qu’il avait pour mission de veiller à l’application de la loi ».

Le conseil constitutionnel n’avait pas non plus remis en cause cette conception qu’il avait jugé conforme à la constitution dans sa décision du 11 aout 1993 au visa de l’article 66 de la constitution.Les auteurs de la saisine reprochaient alors à la loi 93-2 du 4 janvier 1993 de méconnaitre le principe de la liberté individuelle en donnant compétence au procureur de la république pour autoriser la prolongation au-delà de vingt-quatre heures de la garde à vue, alors que cette prolongation devait être selon eux subordonnée à une décision du magistrat du siège.

Argument auquel le conseil a répondu que ; » l’autorité judiciaire qui, en vertu de l’article 66 de la constitution, assure le respect de la liberté individuelle, comprend à la fois les magistrats du siège et ceux du parquet. »

Le conseil constitutionnel aura encore l’occasion de réaffirmer sa position antérieure dans une décision du 2 mars 2004 au sujet de l’article 30 nouveau du code de procédure pénale qui définit et limite les conditions dans lesquelles s’exercent l’autorité du ministère de la justice sur les magistrats du parquet ; 

» L’article 30 du nouveau code de procédure pénale, qui définit et limite les conditions dans lesquelles s’exerce  cette autorité, ne méconnait ni la conception française de la séparation des pouvoirs, ni le principe selon lequel l’autorité judiciaire comprend à la fois les magistrats du siège et ceux du parquet,.. »

La manière très explicite avec laquelle la CEDH aujourd’hui remet en cause la conception française de l’autorité judiciaire à l’occasion de l’affaire MEDVEDYEV aura des conséquences sur la réforme annoncée du juge d’instruction.

Dans une décision rendue le 3 juin 2003, Pantéa contre Roumanie, il ressortait déjà de cette décision l’attachement de la cour à l’indépendance du magistrat à l’égard du pouvoir exécutif, et pris au sens de l’article 5.3 de la convention Européenne des droits de l’homme.

Avec l’arrêt Medvedyev contre France, du 10 juillet 2008, la position de la cour Européenne est encore plus explicite alors qu’elle vise cette fois directement le statut du parquet Français.

Cette jurisprudence amène les auteurs à s'interroger sur les conséquences de l’arrêt Medvedyev, et notamment sur la réforme de grande envergure du juge d’instruction, et quant aux prérogatives du parquet à l’égard aussi de l‘article 6.1 de la convention;

 « Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, …. »  (Voir la note de JP Marguénaud, rebue de science criminelle, 2009 ; « Tempête sur le parquet »)

La portée de l’arrêt Medvedyev peut s’étendre à toutes les phases de la procédure pénale placées sous le contrôle d’une autorité non judiciaire au sens de la jurisprudence de la cour Européenne. En clair à toutes les phases placées sous la responsabilité du procureur de la république, et plus particulièrement celles au cours desquelles sont prises des décisions attentoires à la liberté individuelle. 

Alors que la magistrature insistait sur la priorité qui doit être donnée à l’indépendance des organes de poursuite qui ne peuvent être soupçonnés de subir des influences (lettre d’information du syndicat de la magistrature jullet 2009), la France décidait de persister et de porter l’affaire devant la grande chambre de la cour Européenne pour une décision très attendue.

Etant donné la sensibilité de l'affaire, le gouvernement français s'était fortement mobilisé pour faire passer des messages clairs à la Cour de Strasbourg, et pour la sensibiliser aux conséquences d'une confirmation de sa jurisprudence.

La décision de la grande chambre de la CEDH était attendue.

Elle est finalement intervenue le 29 mars 2010 et confirme la condamnation de la France dans l'affaire dite Medvedyev, mais seulement  sur le fondement de l’article 5.1 de la CEDH.

Toutefois, elle ne confirme pas sa jurisprudence du 10 juillet 2008, pas plus qu’elle ne l’infirme d’ailleurs, et selon laquelle le procureur français n'est pas une "autorité judiciaire au sens que la jurisprudence de la Cour donne à cette notion", au prétexte qu'"il lui manque en particulier l'indépendance à l'égard du pouvoir exécutif pour pouvoir être ainsi qualifié".

Elle a tout simplement pu contourner la question du statut du parquet en profitant notamment d’un nouvel élément factuel,  estimant que la question de la présentation des requérants à une autorité judiciaire indépendante ne se posait plus dès lors que les requérants, en l'occurrence des trafiquants de drogue, ont été présentés dès leur arrivée en France, à un juge du siège (juge d'instruction).

S’agissant  de la période entre l’arrivée à Brest des marins et leur présentation à un juge, le gouvernement Français « a apporté des informations étayées sur la présentation des requérants, le jour même, à des juges d'instruction chargés de l'affaire », ce qu’il n’avait pas fait auparavant (§ 127 – la Cour indique de façon mesurée qu’elle « ne peut que [le] regretter »).

Dès lors, cette « période de huit à neuf heures » qui s’est écoulé entre l’arrivée des marins à Brest et la présentation à l’autorité judiciaire est jugée « compatible avec la notion d'"aussitôt traduit" » (§ 133), étant souligné que ; «les juges d'instruction, lesquels sont assurément susceptibles d'être qualifiés de "juge ou autre magistrat habilité par la loi à exercer des fonctions judiciaires" au sens de l'article 5 § 3 de la Convention ». La France n’est donc pas condamnée au titre de l’article 5.3.

Pour autant la grande chambre a-t-elle contourné la question de l’indépendance de l’autorité judiciaire à l'égard du pouvoir politique ?

La cour reconnait finalement qu'il n'y a pas de violation de l'article 5 § 3 de la convention (puisque la mesure a été prise par un juge d'instruction) mais elle réaffirme aussi clairement qu'une autorité judiciaire compétente doit être indépendante à l'égard de l'exécutif et des parties, et exclut du même coup le ministère public de la catégorie. Ce qui confirmerait au moins implicitement, mais tout aussi clairement, que le procureur français n'est pas une "autorité judiciaire" au sens que la jurisprudence de la Cour donne à cette notion.

L'arrêt de la CEDH va donc continuer à nourrir le débat sur le statut du parquet.

Le projet de réforme de procédure pénale ne prévoit aucun changement de statut du parquet. Aujourd'hui, les procureurs sont nommés par le pouvoir exécutif sur un avis simple du Conseil supérieur de la magistrature. Ils peuvent recevoir des instructions individuelles du pouvoir.

Thierry Tamisier. Le 31 mai 2010.

La Cour européenne des droits de l’homme

Prérogatives Créée en 1959, la Cour européenne des droits de l'homme est chargée de veiller à l'application par les 47 Etats membres du Conseil de l'Europe de la Convention européenne des droits de l'homme. Ce texte garantit le droit à la vie, à la liberté et à la sûreté, au procès équitable, au respect de la vie privée et à la liberté d'expression. Il interdit la torture, les traitements inhumains, l'esclavage, le travail forcé.

Condamnations de la France De 1959 à 2009, la France a été condamnée 576 fois sur 773 arrêts. Elle est au 7e rang des pays les plus condamnés après la Turquie, l'Italie, la Russie, la Pologne, l'Ukraine et la Roumanie. 

http://www.lemodemdepsl.com/article-la-cedh-cour-europeen...

 

 

 

CEDH 29 Mars 2010, l'arrêt Medvedyev et autres c. France

Sur le statut du Procureur de la République en France qui n'est pas une autorité judiciaire indépendante du pouvoir exécutif (les politiques) et sur la légalité des gardes à vue ou des privations des libertés.

Voir la décision de la CEDH
du 29 Mars 2010 Medvedyev et autres c. France sur le site de l'Union des Jeunes Avocats.

CEDH 29 Mars 2010 Medvedyev et autres c. France

CEDH 29 Mars 2010 Medvedyev et autres c. France


Nous publions ci-dessous l'Arrêt rendu par la Cour Européenne des Droits de l'Homme le 29 Mars 2010 dans l'affaire Medvedyev et autres c. France.

cedh_29_mars_2010___affaire_medvedyev_et_autres_c__france.doc CEDH 29 Mars 2010 - AFFAIRE MEDVEDYEV ET AUTRES c. FRANCE.doc  (445.5 Ko)

http://www.uja.fr/CEDH-29-Mars-2010-Medvedyev-et-autres-c...

Affaire France Moulin : la CEDH considère que le parquet français ne constitue pas une autorité judiciaire indépendante

Sur le statut du Procureur de la République et sur la légalité des gardes à vue.

Selon la CEDH le Procureur de la République n'est pas une autorité judiciaire indépendante de l'exécutif (les politiques). Avec le scandale des gardes à vue illicites cela nous donne une idée pour savoir où se situe l'autorité judiciaire indépendante en France !

Les fichiers en PDF à télécharger en bas de l'article, plus une série de décisions intéressantes.

CEDH 23 Novembre 2010 France Moulin c. France

Affaire France Moulin : la CEDH considère que le parquet français ne constitue pas une autorité judiciaire


Nous publions ci-dessous l'Arrêt rendu par la Cour Européenne des Droits de l'Homme le 23 Novembre 2010 dans l'affaire France Moulin c. France, ainsi que le Communiqué de Presse.

La Cour ne se prononce qu’à l’égard de la notion spécifique d’ « autorité judiciaire » au sens de l’article 5 § 3 de la Convention, et non au sens national.

La Cour précise à cet égard qu'il "ne lui appartient pas de prendre position dans le débat concernant le statut du ministère public en France".

Or, la Cour considère que, du fait de leur statut, les membres du ministère public, en France, ne remplissent pas l’exigence d’indépendance à l’égard de l’exécutif.

En outre, la Cour rappelle que les caractéristiques que doit avoir un juge ou magistrat pour remplir les conditions posées par l’article 5 excluent notamment qu’il puisse agir par la suite contre le requérant dans la procédure pénale, ce qui est le cas du ministère public.

Dès lors, selon la Cour, le Procureur adjoint de Toulouse, membre du ministère public, ne remplissait pas, au regard de l’article 5 § 3 de la CEDH, les garanties d’indépendance pour être qualifié, au sens de cette disposition, de « juge ou (...) autre magistrat habilité par la loi à exercer des fonctions judiciaires ».

cedh_23_novembre_2010_moulin___france.pdf CEDH 23 Novembre 2010 Moulin - France.pdf  (3.6 Mo)
communique_de_presse_arret_moulin_c_france.pdf Communiqué de Presse arrêt Moulin c france.pdf  (160.21 Ko)

Rédigé le Mardi 23 Novembre 2010